Un cycle de projections-débats sur la ville et les arts de la rue animées par des professionnels et suivies d'un échange avec le public
A L'INSTITUT FRANÇAIS D'HAÏTI Cycle Arts de la rue. Projections proposées par l'Institut français et présentées par
Eva Doumbia, Hervée de Lafond, Jacques Livchine et Philippe Robert
mardi 7 décembre - 6 h pm - entrée libre
ROYAL DE LUXE, RETOUR D'AFRIQUE de Dominique Deluze, documentaire, 1999, 55', couleur. Production : les films à Lou, K production, La Sept-Arte.Pendant six mois, la compagnie Royal de Luxe s'est installée dans différents villages du Cameroun en quête d'un mariage utopique, celui de deux imaginaires qui s'enrichiraient l'un l'autre, et dont la matérialisation a pris la forme de contes interprétés par des marionnettes.
Pour les Guizigas, les esprits habitent toute chose et les marionnettes manipulées à vue par les acteurs forment un langage théâtral qui leur parle instantanément. Avec pudeur, le film relate la rencontre entre les artistes venus d'Europe et le quotidien et l'imaginaire des villageois qui les ont accueillis. De cette union est née le Petit Géant, de 6,5 mètres de haut que les habitants de Foulou n'ont pas tardé à adopter, ainsi que d'autres créatures hybrides dont la troupe nous a déjà habitué. Dominique Deluze donne un bel écho à cette aventure en montrant avec simplicité et justesse l'émotion partagée, les questionnements, la confrontation souvent bruyante et colorée, parfois muette, toujours déconcertante.
mercredi 8 décembre - 6 h pm - entrée libre LES PLUME FONT LEUR CIRQUE de Christophe de Ponfilly, documentaire, 1994, 52', couleur. Poduction : Interscoop, F3.
Les Plume ont fondé une troupe étonnante, loin de l'image traditionnelle du cirque : musiques, numéros, costumes composent des spectacles en forme de rêve réalisé. Christophe de Ponfilly s'est immergé dans la vie ordinaire et extraordinaire de ces artistes.
Derrière la piste, le chapiteau et le cercle des caravanes, le réalisateur nous entraîne dans l'intimité de chacun et nous partageons un moment de leur vie quotidienne, de leur travail, de leurs aspirations. Nous recomposons par fragments l'histoire de la compagnie, de la rencontre des artistes fondateurs à la fanfare de Besançon, des débuts difficiles, à la reconnaissance et au succès. Les souvenirs de cette bande de complices se faufilent à travers des extraits de leur dernier spectacle et des moments de répétitions pour composer un touchant portrait de groupe.
Jeudi 9 décembre - 6 h pm - entrée libre ECLIPSE de Bartabas, documentaire, français, 1998, 59'
Dans ce spectacle de Bartabas filmé par lui-même, tout est noir et blanc comme l'ombre et la lumière, et le parti pris est à ce point abouti que la moindre touche d'une autre couleur aurait constitué une effraction vulgaire, une indiscrétion. Dans le long voyage entrepris par le Théâtre Zingaro, ce spectacle donne à voir tout le chemin déjà parcouru, vers davantage d'ascèse et d'harmonie.
Une nouvelle rencontre a inspiré ce spectacle : celle des mélodies du shinawi et des « voix sanglantes » du chant pansori, nourris de la force intérieure ancestrale du pays « du matin calme », la Corée. Au son de ces chants primitifs et puissants, danseurs, comédiens, cavaliers, acrobates, chevaux et lumières composent en symbiose des tableaux successifs d'une beauté parfaite. Le maître de cérémonies démontre là encore sa maîtrise absolue de l'art équestre. Dans chaque geste de l'homme et chaque pas du cheval, il y a cette connivence qui génère l'émotion. L'atmosphère est de l'autre bout du monde, poétique, érotique, grave ou facétieuse. Chacun peut y puiser ce qui fera écho à sa fantasmagorie, dans le plaisir et l'émerveillement de l'ouverture au monde.
A LA FOKAL Cycle sur le thème de la ville. Projections proposées
et présentées par Lucie Couet, urbaniste
mercredi 1er décembre - 5 h pm - entrée libre MARTISSANT, LE RÊVE D'HABITER, de Michèle Lemoine - documentaire - Haïti 2010 - 82', couleur - production : Fokal. avec le soutien de l'Union Européenne
Port-au-Prince, Haïti : nous sommes à Martissant, un quartier marginalisé au sud de la ville, fragilisé depuis des années par les violences politiques et sociales, où l'accès aux services de base est réduit au minimum. Au cœur du quartier, quatre propriétés privées, l'Habitation Leclerc, les résidences Mangonès, Dunham, Fongging et Pierre Antoine, forment un espace vert de quinze hectares unique dans la capitale. En 2007, elles ont été déclarées d'utilité publique et la Fondation Connaissance et Liberté - Fokal, une ONG haïtienne, a été chargée par le gouvernement de créer un parc naturel sur le site. Martissant et sa population sont au cœur du projet. Une zone d'aménagement concerté, la Zac, a été créée : elle englobe le parc et les quartiers voisins. La création du parc vise non seulement à sauvegarder un espace boisé en danger, mais aussi à construire un lieu collectif que la population pourra s'approprier. L'objectif à long terme est de revitaliser la zone en fédérant les énergies, pour rendre possible l'existence d'un espace qui offrira des perspectives économiques et deviendra un vrai lieu de citoyenneté.
Martissant, le rêve d'habiter suit pendant deux ans les débuts de la création du parc. Le film remonte aux origines du parc et au contexte dans lequel il s'insère, décrit l'évolution de Martissant au fil des ans et aborde les problèmes d'urbanisme cruciaux du quartier. Il évoque ensuite les premiers pas du projet, de l'apprentissage du terrain aux premières interventions, en suivant les travaux dans le parc, les actions dans la communauté de Martissant et les réflexions qui jalonnent cette phase de démarrage. A travers le récit de la création du parc, se dessinent des enjeux complexes : entre le projet de modèle urbain d'une organisation, la Fokal, engagée dans une première expérience à grande échelle, et l'espoir immense des habitants de Martissant, c'est en réalité une espérance commune qui émerge : celui d'un pays vivable, habitable. Le parc est le fer de lance d'un projet indissociable d'une population vivant dans la précarité, mais pleine de vitalité et de désir : désir de services, de sécurité, d'emploi, de santé, d'éducation, désir d'état... Martissant, le rêve d'habiter se veut témoin du travail réalisé par la Fokal, et outil pour qui veut penser un projet urbain au sein d'une communauté confrontée à de nombreux défis. Il tente de rendre compte d'un travail au quotidien, d'une vision à long terme, et de faire écho à un rêve de ville.
Vendredi 3 décembre - 5 h pm - entrée libre
CALCUTTA de Louis Malle - documentaire - France 1969 - 90 '.
La mégapole indienne en 1968 sous l'œil documentaire de Louis Malle. Un classique du genre. Prix de la Fraternité 1969. Une expérience de cinéma direct réalisée à Calcutta en février 1968. Entièrement improvisé, le film décrit la vie des habitants et les problèmes immenses que soulève la situation économique et démographique de la ville. Cette formule très souple de reportage nous permet de plonger dans la réalité de la ville, des scènes quotidiennes, rues surpeuplées, marchés, manifestations de femmes et d'étudiants, les bidonvilles, les usines... Ce film ne prétend pas être autre chose que ce qu'il est : un regard porté sur la ville pendant quelques semaines. Un regard d'Occidental. Totalement improvisé, il a été tourné à trois (un cameraman, un ingénieur du son, un réalisateur), en couleur, en son synchrone, dans une formule très souple de reportage, qui permet de plonger dans la réalité de la ville, sans mise en scène, sans préoccupations esthétiques (Louis Malle).
Lundi 6 décembre - 5 h pm - entrée libre CITY2CITY - D'UNE VILLE A L'AUTRE
Crossings (Marina Chernikova) / 2. Nil (Nose Chan) / 3. Worst case scenario (John Smith) / 4. Sarajevo vertical (Toby Cornish) / 5. From 7PM to 7PM (Alli Savolainen) / 6. Exchangeable cities (Kentaro Taki) / 7. Street crossing (Pablo Altes) / 8. Es Geht Auch Schneller (Ulrich Fischer) / 9. Hors chants (Dudouet & Kaplan) / 10. Je n'ai pas du tout l'intention de sombrer (Augustin Gimel)
City2City - d'une ville à l'autre réunit dix artistes de l'image issus de pays différents (Russie, Pays-Bas, Hong Kong, Grande-Bretagne, France, USA, Finlande, Suisse...) mais travaillant ici sur une thématique commune: la ville et l'urbanité. Composé de films inédits à ce jour, jamais parlés (muets ou musicaux), la compilation entend proposer un nouveau regard sur l'esthétique de la ville et sa perception artistique dans le domaine de l'art vidéo et du cinéma expérimental. À la fois belle et monstrueuse, la ville est en nous. Elle traduit notre chaudron intérieur par son désordre manifeste. Elle concrétise notre soif de liberté comme notre impossibilité à sortir de nos prisons, qu'elles soient réelles ou irréelles. La ville est, comme le pharmakon des Grecs, tout autant un poison qu'un remède, une catastrophe qu'une beauté insondable. Elle nous hante comme nous la hantons de nos regards, de nos appareils photos et de nos caméras.
Vendredi 10 décembre - 5 h pm - entrée libre FACE A LA MER de Raymond Depardon - Clip vidéo, 3'30", 1993, 35 mm couleur
Raymond Depardon est allé photographier Beyrouth, avant que la ville ne soit détruite puis reconstruite. Il filme en un seul plan-séquence ses photographies sur une musique des Négresses Vertes.
ALLEMAGNE ANNEE ZERO, un film italien de Roberto Rossellini (Germania anno zero), 1947, noir et blanc, 1h16 min VOSTF) scénario de Roberto Rossellini, Carlo Lizzani et Max Colpet d'après une idée de Basilio Franchina
Berlin au lendemain de la guerre. Dans la ville en ruines, occupée à sortir du cauchemar nazi, Edmund, un jeune garçon de 15 ans, vit de rapines pour faire survivre sa famille, tout en cherchant des repères dans un monde qui n'en a plus... Sa famille se débat avec les difficultés de la vie : le père malade est soigné par sa fille, le fils aîné, un ancien SS récemment démobilisé, n'ose pas se présenter aux autorités d'occupation et vit, caché, sans carte d'alimentation. Un jour, au cours d'une promenade, Edmund retrouve un de ses anciens professeurs, ex-nazi. Celui-ci lui rappelle les principes d'Hitler sur l'élimination des faibles et des inutiles. Le père ayant dû être hospitalisé et répétant machinalement qu'il vaudrait mieux pour tous qu'il soit mort, Edmund, sans mesurer la portée de son geste, l'empoisonne. Le professeur, mis au courant par Edmund, ne veut pas endosser la responsabilité de ce qu'il considère à présent comme un crime. Désespéré, l'enfant erre tristement dans les rues au milieu des décombres et finit par se jeter d'un cinquième étage d'une maison en ruines. Evitant tout sentimentalisme ou effet spectaculaire, refusant de porter le moindre jugement, la caméra de Rossellini continue à appliquer la leçon du néoréalisme : regarder pour comprendre. En suivant l'odysée d'Edmund, Allemagne année zéro, nous dévoile le désarroi moral et social d'un pays en quête d'une nouvelle identité.
Lundi 13 décembre - 5 h pm - entrée libre
FELLINI ROMA de Federico Fellini (Roma di Fellini, Italie/France, 1972).Scénario : F. Fellini et Bernardino Zapponi. Image : Giuseppe Rotunno. Musique : Nino Rota. 120 mn. Avec Peter Gonzales, Fiona Florence, Marne Maitland, Anna Magnani, Marcello Mastroianni.
En 1972, Fellini s'attaque à un film-somme sur Rome, sa ville, qu'il n'a cessé de réinventer depuis Cinecittà. En plusieurs tableaux, il compose un puzzle onirique et nostalgique.
Tout commence avec des clichés revisités : le passage du Rubicon par Jules César mimé par un professeur d'histoire ; des diapos jaunies des principaux monuments ; un extrait d'un péplum en noir et blanc ; une tablée en pleine rue avec énoncé des spécialités gastronomiques romaines...
Fellini est boulimique de sa ville, veut en montrer toutes les facettes en un regard, comme un tableau cubiste ou le rêve le plus fou d'un surréaliste de génie. Construit selon la logique de l'écriture automatique, Roma entrechoque les époques à travers les souvenirs truculents de son créateur. Le brouillard, la poussière enrobent toute vision d'une couche de nostalgie : les statues s'estompent dans la brume, les fresques s'effacent dans un souffle (merveilleux épisode de la construction du métro), un bateau fantôme hérissé de têtes de mort glisse en apesanteur... annonçant le navire lumineux et féerique d'Amarcord, récit de l'enfance à Rimini.
Rome est le théâtre de l'illusion, où le cinéma, la politique et l'Eglise se tiennent par la main en une ronde folle mêlant défilé de mode ecclésiastique, tournage foutraque sur l'autoroute et annonce des avancées des troupes du Duce en plein cabaret minable. Fellini en est le maestro fabuleux, le démiurge mégalo qui puise son imagination à la source de ses fantasmes. Ultime hommage : une image fugace d'Anna Magnani, la Mamma Roma de Pasolini, figure définitivement tragique d'une Rome mythique, d'une époque révolue. |