Nouvèl FOKAL

mercredi 13 avril 2011

Parc de Martissant : les belles plantes


Dans le cadre de la création du parc de Martissant, Nouvèl FOKAL vous propose d’apprendre à mieux connaître les différentes espèces végétales qui peuplent le parc. Pour cette édition, nous nous proposons de vous conter l’histoire de l’arbre appelé Lam veritab en Haïti (artocarpus altilis). La feuille de cet arbre, très présent dans le parc, a inspiré le logo du parc de Martissant. Lam veritab détient par ses fruits des qualités nutritives et est un témoin de l’histoire d’Haïti.

Lam veritab fleurit toute l’année et se reproduit en replantant un rejet de l’arbre principal. Le fruit de cet arbre, appelé lam en Haïti, a des qualités nutritives connues – il contient 30% de fécule – et est utilisé pour des gratins, des croquettes, des beignets… L’histoire de l’importation de cet arbre dans les Caraïbes porte le témoignage du fonctionnement des empires coloniaux, de l’esclavage et de la marine. Dans leurs migrations au départ de l’Indonésie, des navigateurs migrants qui peuplèrent la Polynésie (Pacifique sud) emportèrent des plants de l’arbre véritable et sélectionnèrent les plus intéressants au fil des siècles.


L’arbre véritable a été introduit dans les Caraïbes à la fin du XVIIe siècle, sous le règne de Georges III, roi d’Angleterre, à la demande des planteurs qui désiraient nourrir leurs esclaves à moindre frais. L’indépendance des treize colonies britanniques d’Amérique du Nord avait en effet mis fin au lucratif commerce triangulaire et rendu prohibitif le prix de nombreuses denrées. Un naturaliste anglais, qui avait voyagé avec le capitaine Cook en Polynésie, avait pu constater l’intérêt nutritif de l’arbre à pain. Le roi Georges III s’enthousiasma à l’idée d’importer cet arbre dans les plantations du Nouveau Monde.

Une première expédition du navire le Bounty à Tahiti pour ramener des plants d’arbre à pain est restée célèbre dans l’histoire. L’équipage du Bounty, navire de la Royal Navy britannique, et son lieutenant, William Bligh, quittèrent l’Angleterre en décembre 1787. Après un voyage difficile de 10 mois, le Bounty accosta à Tahiti. Le chef des Tahitiens accepta d’échanger des plants d’arbre à pain contre des hachettes, limes, vrilles, scies et miroirs. La récolte de plants de lam dura six mois. Les plants furent entreposés dans le bateau, spécialement aménagé pour ce transport. En avril 1789, le Bounty quittait Tahiti. Deux semaines plus tard, l’équipage déclencha une mutinerie qui deviendra célèbre. Exaspérés par les ordres de leur lieutenant et les restrictions d’eau à bord pour arroser les 1 000 plants de lam, 11 hommes prirent le contrôle du bateau et abandonnèrent leur lieutenant et une partie de l’équipage sur un canot. Les mutins accostèrent en 1790 sur l’île de Pitcairn dans le Pacifique sud où ils brûlèrent le Bounty, dont on peut toujours visiter les ruines aujourd’hui.

En 1791, une nouvelle expédition du navire la Providence avec à son bord le lieutenant, devenu capitaine, qui avait survécu à la première mutinerie permit de ramener 2 000 plants de lam de Tahiti dans les Antilles jusque dans les colonies britanniques de la Caraïbe, Saint Vincent et la Jamaïque. Ironie de l’histoire, les esclaves de Jamaïque refusèrent de manger ce nouveau fruit…

La mutinerie du Bounty fut une source d’inspiration pour de nombreuses œuvres littéraires et cinématographiques, dont Les révoltés du Bounty avec Clark Gable et Charles Laughton en 1935, Les révoltés du Bounty en 1962 avec Marlon Brando, et le roman Les révoltés de la Bounty de Jules Verne (1879).