Deux animateurs du projet « Parc de Martissant » ont participé, durant ce mois d’Avril, à une formation d’ONU FEMMES à la méthodologie des marches exploratoires. Depuis son initiation à Toronto (Canada) en 1989, cet outil a été diffusé à travers divers réseaux « femmes et ville » ou « femmes et habitat », notamment en Argentine, au Chili, en Colombie et au Guatemala avec l’appui d’ONU FEMMES.
L’organisation internationale ONU Femmes (anciennement Unifem), par le biais de sa représentation en Haïti, a organisé à Port-au-Prince une importante formation dans le cadre de son projet baptisé « villes sécuritaires ». Par ce projet, les responsables d’ONU Femmes en Haïti vise à réduire la prévalence de la violence à l’égard des femmes et des filles dans les espaces publics. Cette formation a été l’occasion de transmettre aux participants l’outil le plus utilisé par les intervenants dans le domaine de la promotion de la sécurité des femmes dans l’espace public : les marches exploratoires.
Les marches exploratoires consistent en des sorties par groupe de trois à six personnes, en majorité des femmes d’un même quartier. Loin d’être des visites ordinaires, cette activité les aide à identifier des caractéristiques physiques et sociales du quartier ainsi que les facteurs générateurs de l’insécurité pour les fillettes, les femmes et les enfants. Un environnement sécuritaire est un lieu propre, bien éclairé et dégagé, sans endroit où quelqu’un pourrait se cacher pour commettre des agressions. C’est un lieu avec des signalisations qui permettent de s’orienter, c’est-à-dire de savoir où l’on est et où l’on va.
Selon l’intervenante principale, la sociologue Marie-Thérèse Vidiani, « les marches exploratoires sont un moyen permettant de faire une évaluation critique de l’environnement. Cette démarche s’appuie sur le principe qui veut que les femmes soient les mieux placées pour identifier les facteurs qui peuvent influencer leur sentiment de sécurité ».
Cet exercice a déjà été mené dans divers pays de l’Amérique latine notamment l’Argentine et au Guatemala. Il a permis d’identifier les problèmes et faire des propositions très concrètes pour améliorer la sécurité dans les rues et d’autres espaces publics dont l’ensemble de la population est bénéficiaire.
Avant les « marches » en tant que telles, un atelier préparatoire est organisé, dans le but de construire une vision partagée du quartier par tous les participants. Ils prennent connaissance des plans du quartier, ils établissent ensemble un lien entre les caractéristiques physiques et sociales du quartier et la violence ainsi que la peur ressentie par les femmes. Ensuite, ils élaborent une méthodologie des marches et un questionnaire d’enquête.
Il s’agit ensuite d’arpenter les lieux, afin d’identifier les facteurs qui peuvent influencer le sentiment de sécurité des femmes. Toutefois, avant la marche, une réunion de 30 min permet de revoir les dispositifs. La marche dure environ 60 minutes. Ce temps sert à l’observation du lieu, à remplir le questionnaire et à la prise des photos. Il est recommandé de réaliser au moins deux marches dans le même quartier. Le partage des observations s’effectue ensuite et s’appuie sur les guides complétés par chacun des participants lors des différentes marches. Ensemble, on élabore un tableau de synthèse des informations recueillies.
L’un des objectifs de cette démarche est de promouvoir l’inclusion de la problématique de la violence urbaine dans les politiques publiques. Les propositions et recommandations issues des différentes activités incluses dans ce processus sont transmises aux responsables des institutions publiques chargés de la planification et de la gestion territoriale et sociale. Ainsi, elles font l’objet de plaidoyer et de campagnes de sensibilisation tant au niveau national que régional.
Après deux semaines d’activités, les initiatrices de cette formation peuvent se réjouir de la façon dont s’est déroulée la formation. Tous les objectifs ont été atteints et toutes les étapes de la démarche ont été exécutées. La zone de Bristout, située à Pétion-ville, a été retenue comme quartier pilote pour la réalisation des marches. Et pour ceux qui y ont pris part, l’expérience a été très enrichissante et utile.
Somme toute, les marches exploratoires se révèlent un outil efficace pour la lutte contre les violences faites aux femmes en Haïti. Mais elles ne peuvent, évidemment, remplacer les autres moyens pouvant aider à la résolution du problème.
Eddy Robenson David Derosier
Formateur & Animateurs FOKAL/
Parc de Martissant Avril 2011